Le carbone, ressource essentielle pour l’industrie sucrière
L’industrie sucrière produit différents types sucres, obtenus par extraction du principe actif recherché (saccharose, dextrose, etc.), de plantes comme la betterave, la canne à sucre ou encore le blé. Les procédés de fabrication du sucre mis en œuvre nécessitent des nombreuses étapes dont l’une d’elle consiste à éliminer les substances organiques indésirables des jus obtenus. Dans cette étape, le carbone a un rôle essentiel à jouer, soit directement en utilisant du charbon actif granulaire (CAG), soit indirectement en utilisant du lait de chaux qui nécessite du charbon pour sa fabrication.
Le CAG, un charbon activé par augmentation de sa surface
Le charbon en tant que tel n’a pas de propriétés de filtration intrinsèque. Il doit être transformé en charbon actif pour acquérir cette propriété. Le charbon actif (également nommé charbon activé ou carbone activé) est un matériau rendu poreux par des actions de pyrolyse et d’oxydation ménagée. Ces opérations aboutissent à l’obtention d’un carbone presque pur avec une surface spécifique (surface poreuse déployée par gramme de produit) plus grande en créant des millions de pores microscopiques sur le carbone. La porosité du charbon actif obtenue varie de 500 à 1.500 m² par gramme de matière transformée. Cette propriété permet d’éliminer efficacement des impuretés, contenues dans des gaz ou des liquides, impossibles à éliminer autrement (on parle ici d’adsorption).
L’adsorption que permet le charbon actif est donc un phénomène de surface. Les atomes, les ions ou les molécules à éliminer, appelés « adsorbats » vont être attirés par cette surface, appelé « absorbant », et venir s’y fixer. Le charbon actif possède des capacités uniques d’attraction et de liaison qui s’exercent sur une grande variété de composés impropres à la consommation humaine. Les absorbats peuvent être contenus indifféremment dans une phase gazeuse ou une phase liquide. Pour les exploitations sucrières, la phase est liquide car les absorbats sont contenus dans les jus bruts et le charbon actif utilisé est sous forme granulaire (appelé charbon actif granulaire ou CAG). Le CAG est également utilisé dans une large gamme d’applications de production d’aliments et de boissons.
Fabrication industrielle du charbon actif
Le charbon actif peut être produit à partir de différentes sources qui peuvent être d’origine végétale ou animale. Le charbon actif végétal (ou charbon végétal activé) peut ainsi être obtenu à partir de houille, de tourbe, de lignite ou de résidus pétroliers d’hydrocarbures, pour les combustibles fossiles, ou d’écorce ou de pâte de bois, de coques de cacahuètes ou de noix de coco ou de noyaux d’olives (biomasse). Le charbon actif animal (appelé noir animal) est, quant à lui, obtenu à partir d’os frais animaux. Depuis 2000, le charbon actif animal n’est plus utilisable dans l’industrie agroalimentaire.
L’activation du charbon consiste à créer des pores dans la matrice du carbone par actions chimiques ou mécaniques. Cette activation est obtenue en soumettant la matière première carbonée à de fortes températures (combustion par pyrolyse), à une action physique (jet de gaz carbonique) et/ou à une action chimique (acides de Lewis). Les fabrications industrielles les plus courantes se passent en deux étapes : élimination des éléments chimiques autres que le carbone créant une première porosité, puis élimination des goudrons non calcinés restés absorbés qui obstruent les pores ainsi créés. Le taille des pores obtenus dépend du procédé déployé : par action physique, les pores sont plutôt étroits, par action chimique les pores sont plutôt larges. Le diamètre des pores obtenus dépend également de la taille initiale des pores de la matière première de départ. Ainsi, les coques de noix de coco et les bois denses (wengé, charme, chêne, érable, eucalyptus, frêne) permettent d’aboutir à des pores inférieurs à 2 nanomètres (micropores), les bois moyennement denses (bouleau, châtaignier, mélèze, merisier) à des pores compris entre 2 et 50 nanomètres (mésopores) et les bois blancs (épicéa, pin sylvestre, sapin) à des pores supérieurs à 50 nanomètres (macropores). La capacité d’adsorption du charbon actif dépendra de la surface disponible et donc de la taille des pores.
Pour des charbons actifs destinés à l’industrie sucrière, l’activation chimique est souvent préférée à l’activation physique car les températures appliquées sont plus basses et les temps d’activation du matériau plus courts. Avec un CAG obtenu par procédé chimique, les industriels du sucre font des économies de moyens et d’énergie en ayant accès à un charbon actif moins coûteux.
Utilisation du charbon actif dans les industries sucrières
Il existe trois formes de charbons actifs sur le marché qui se présentent toutes sous l’aspect d’une poudre noire : charbon actif granulaire (CAG), charbon actif en poudre (CAP) et charbon actif extrudé (CAE). Le charbon actif granulaire (CAG) est constitué de particules de formes irrégulières parmi une gamme de tailles allant de 0.2 mm à 5 mm et utilisé dans des applications en phase liquide et gazeuse. Le charbon actif en poudre (CAP) est constitué de particules d’une taille inférieure à 0,18 mm et employé dans des applications en phase liquide et pour le traitement des flux gazeux. Le charbon actif extrudé (CAE) est constitué de particules de formes cylindriques avec des diamètres allant de 0.8 mm à 5 mm et réservé à des applications en phase gazeuse à cause de sa faible perte de charge, de sa grande résistance mécanique et de sa faible teneur en poussières.
Dans l’industrie sucrière, le CAG est une substance très efficace pour éliminer les impuretés et substances toxiques autres que la molécule active. Il permet aussi de décolorer. Ces deux propriétés sont essentielles à la production de sucre blanc. Outre la décoloration, le GAC permet d’éliminer les odeurs et les goûts indésirables. Il s’agit d’une étape essentielle de blanchiment dans le procédé de raffinage aboutissant à l’obtention de sucres stables.